Maire-info
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Édition du jeudi 19 septembre 2024
Finances locales

Finances locales : la situation des petites villes s'est « améliorée » en 2023, mais reste « fragile » pour 2024 

Alors que les Petites villes de France tiennent leur congrès aujourd'hui et demain, elles estiment qu'une « attention toute particulière » devra être portée, dès 2024, à leurs capacités d'investissement.

Par A.W.

Si les petites communes ont réussi à préserver leurs marges de manœuvre et à investir en 2023, l’année 2024 devra faire l’objet d’une « attention toute particulière ». C’est ce qui ressort d’une étude publiée, hier, par La Banque postale, en partenariat avec l’Association des petites villes de France (APVF) qui organise, en ce moment même, son congrès à Amboise.

Alors que les collectivités ont été accusées par le ministre de l’Économie de faire déraper le déficit public en 2024, le président de l’AVPF, Christophe Bouillon, a une nouvelle fois contesté, hier, le « mauvais procès »  fait aux collectivités. 

Epargne brute en hausse

« Cela n’a aucun sens », a dénoncé le maire de Barentin (Seine-Maritime), qui a rappelé que, « contrairement à l’État, chaque commune se doit de présenter un budget à l’équilibre, chaque projet doit donc avoir son financement, soit par l’emprunt soit par la fiscalité ». « C’est un mauvais procès de faire croire que les collectivités locales ne savent pas gérer leur budget », a déploré le président de l’APVF, alors que les données fournies par Bruno Le Maire restent très contestées

En 2023, en tout cas, les petites villes peuvent se targuer d’une « amélioration »  de leur situation financière, constatent ainsi l’association et La Banque postale dans ce nouveau « portrait financier »  consacré aux comptes des 4 122 communes dont la population est comprise entre 2 500 et 25 000 habitants.

En effet, l’année 2023 « se distingue par une hausse »  de 6,6 % de leur épargne brute (qui représente la différence entre les recettes et les dépenses de fonctionnement), toutes strates confondues. Dans le détail, ce sont les communes de 10 000 à 15 000 habitants qui ont connu la plus forte progression (+ 10,6 %), tandis que celles de 5 000 à 10 000 habitants ont été les moins bien loties (+ 3,9 %). 

Une situation qui s’explique notamment par des recettes de fonctionnement qui ont progressé de 5 %, « notamment du fait de la progression de 7,1 % des valeurs locatives cadastrales ».

Reste que « cette embellie doit être relativisée dans la mesure où les dépenses locales continuent à être impactées par l’inflation », souligne la filiale de La Poste.

Les dépenses de fonctionnement des petites villes ont ainsi progressé de 4,7 %, l’an passé, portées « principalement par la masse salariale et les achats et charges externes ». De la même manière, les dépenses d'équipement sont « amplifiées par les prix élevés des matières premières ».

Le président de l’APVF, Christophe Bouillon, rappelle également que « les petites villes ont été grandement impactées par l’inflation », que ce soit sur les « factures d’énergie », la « restauration scolaire », ou encore par « l’augmentation du point d’indice » et par le cycle électoral qui fait que « les projets se concrétisent »  en ce moment.

Investissement : en hausse, mais des inquiétudes 

L’amélioration de la situation financière des petites villes a ainsi « profité à l’investissement », constatent les auteurs de l’étude.

Celle-ci a ainsi dépassé, « pour la première fois, en volume, le niveau de référence de 2013 »  pour atteindre plus de 10 milliards d’euros. Grâce à une progression de 11,5 % par rapport à 2022. 

Et « pour la première fois depuis cinq ans, les petites villes mobilisent leur trésorerie au service de l’investissement : cela est particulièrement vrai pour les communes de plus de 10 000 habitants », indiquent-ils, l'APVF notant également que les petites villes « limitent le recours à l’emprunt »  avec une baisse de l’encours de dette de 1,7 %.

Outre l’emprunt, les auteurs soulignent, au passage, que « la trésorerie est le principal levier pouvant être utilisé par les petites villes pour financer la transition écologique, tandis que le levier "fiscalité" semble difficile à mobiliser pour 56 % d'entre elles, compte tenu du niveau d'effort fiscal déjà atteint ».

Derrière ce tableau plutôt élogieux, La Banque postale assure pourtant, sur ce point, que « la réduction des moyens de financement à disposition des petites villes demeure assez préoccupante », notamment « face au mur d’investissements »  qui les attend.

L’Institut de l'économie pour le climat (I4EC) a, en effet, récemment estimé les collectivités vont devoir « plus que doubler »  leurs dépenses climatiques, chaque année, si elles veulent atteindre les objectifs fixés par la stratégie nationale bas-carbone à l’horizon 2030. 

En 2024, d’ores et déjà, « la question de la préservation des capacités d’investissement […] devra faire l’objet d’une attention toute particulière »  au regard du « contexte de ralentissement du niveau d’inflation et de l’impact année pleine des évolutions de l’indice de la fonction publique », prévient ainsi l'APVF, dans un communiqué publié hier.

Fragilisation annoncée en 2024

L’APVF avait, d’ailleurs, alerté, dès le printemps dernier, sur une situation financière qui allait subir une « fragilisation sensible »  en 2024. Dans son enquête annuelle sur les finances de ses adhérents, elle constatait une dégradation « assez marquée »  de la situation, avec de plus en plus de petites villes qui peinaient à équilibrer leur budget.

Plus de la moitié des petites villes prévoyaient ainsi, cette année, « une baisse de leur épargne nette »  (qui correspond à l’épargne brute après déduction des remboursements de dette, et permet donc d’identifier la part de ressources restant disponible pour investir).

Plusieurs causes étaient citées, au premier rang desquelles l’inflation qui continue de grever les dépenses de fonctionnement alors que les recettes fiscales progressent moins que l’année précédente. Davantage de maires annonçaient donc être contraints d’augmenter leurs taux d’imposition (15 % d’entre eux annonçaient le faire en 2024).

Conséquence directe, si les deux tiers des petites villes avaient augmenté leurs investissements l’an dernier, seulement la moitié devait le faire en 2024. Avec pour résultat que « 45 % des petites villes jugent leurs investissements insuffisants ou très insuffisants »  puisque, à mi-mandat, les investissements devraient au contraire accélérer.

Tout cela a pour effet que 83 % des petites villes prévoyaient d’être contraintes, cette année, de puiser dans leur trésorerie pour faire face.

Télécharger l’étude.
 

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